e Samedi 16 Mars a été inauguré l'Espace Tanassof (« Parité ») à
Tunis. Cette espace entre dans le cadre du projet « Actions positives pour les droits de
citoyenneté des femmes et l'égalité des chances au Maghreb », projet soutenu par la
Commission européenne dans le cadre de l'initiative européenne pour la démocratie
et les droits de l'homme, coordonné par l'iMED (Istituto per il Mediterraneo, Italie) et réalisé en partenariat avec les
associations de femmes, les syndicats et les ONG du Maghreb Central (Algérie,
Maroc, Tunisie). Ce projet a pour objectif premier de réaliser, en 36 mois, différents
volets d'action dont le premier est « la création de trois espaces féminins à Alger, Tanger et
Tunis avec des guichets d'information, de conseil et d'assistance juridique et psychologique,
des cours et des formations sur des thèmes spécifiques et des activités de sensibilisation sur les
droits des femmes » (source : document publié par l'iMED).
Le matin même de l'inauguration de ce nouvel espace femmes et pour faire connaître
le projet, un séminaire intitulé « Citoyenneté et capacités de développement des femmes »
a commencé ses travaux qui devaient se poursuivre durant deux jours (les 16 et 17 mars)
à l'hôtel Amilcar, à Tunis. Y participent des représentantes et représentants
d'institutions maghrébines et arabes, de la Commission européenne de Bruxelles et
de la délégation en Tunisie, des institutions italiennes, des syndicats (UGTT et
USTMA). Ce séminaire, tenu sous la double présidence de l'AFTURD (Association des
femmes tunisiennes pour la recherche et le développement) et de l'iMED,
représenté par son président, Andréa Amato, a donné lieu,
durant la journée du samedi 16 mars, à de nombreuses interventions portant sur la
présentation du projet et son état d'avancement dans les trois pays du Maghreb.
Droits des femmes et démocratie
Situé dans un cadre de coopération euro-méditerranéenne, le projet n'est, comme a tenu à le préciser
Andréa Amato au cours de son intervention, « ni néo-colonialisme ni aide
fraternelle » mais témoigne de la volonté d'aborder ensemble un problème
commun aux deux rives de la Méditerranée, à savoir la sauvegarde et la promotion des
droits des femmes dans la perspective de la citoyenneté. Il s'agit aussi de « travailler
ensemble pour faire avancer trois volets : les droits fondamentaux, la démocratie et le
développement de la société civile ». En effet, le projet met en relation l'accession à la
citoyenneté des femmes et celle des hommes et « la participation des citoyennes et des
citoyens au processus de développement et à l'exercice des droits liés à la citoyenneté »
(document cité). La démocratie devant être considérée comme un processus et non
comme quelque chose d'accompli une fois pour toutes, elle implique la communication
politique (citoyens-pouvoir, pouvoir-citoyens) et le président de l'iMED a estimé que
« nous avons tous dans le monde un problème de ce type face aux nouvelles technologies, aux
médias ». Cette communication implique l'existence d'une société civile organisée,
plurielle, autonome. C'est pourquoi le projet est à la fois un projet dans le domaine
des droits des femmes et dans le cadre plus large des droits à la citoyenneté pour
toutes et tous.
Les maisons de femmes dans les trois pays du maghreb
Malika Remaoun, intervenante algérienne, a parlé du projet comme d'un
défi relevé par neuf associations de femmes et le syndicat, défi qui a pris une forme
organisationnelle qui laisse à chaque association son autonomie avec un
fonctionnement horizontal, sans hiérarchie, l'essentiel étant que « toutes les
associations qui se sont associées partagent une vision commune de l'égalité ».
Toutefois, même si les formalités administratives sont longues et même si le projet
n'a, à ce jour, ni existence légale ni local, « il est aujourd'hui mūr dans nos têtes. Nous
nous sommes attelés à rendre visible le projet notamment dans une région de l'Ouest
algérien où il existe une maison de la femme et de la jeune fille » et cela grâce à
l'initiative du responsable local qui, convaincu du projet, a réuni les fonds pour sa
réalisation. « Ainsi, il a été installé dans ce centre une ligne verte mise à la disposition des
femmes victimes de violences, il y a des ateliers de tissage et de couture pour apprendre aux
femmes un métier ».
La représentante marocaine, présidente du « réseau espace de citoyenneté », a parlé de la
concrétisation du projet dans son pays. La maison des femmes à Tanger est « un espace
conçu comme lieu de sensibilisation, information, concertation par les utilisatrices ». Des
guichets ont été ouverts pour accueillir et orienter les femmes formulant le besoin
d'être assistées, elles bénéficient de la présence d'une assistante durant plusieurs
consultations. La maison a permis la sensibilisation des jeunes à l'égalité des chances
et un travail de sensibilisation a été entamé pour informer sur l'ouverture de cet
espace. « On a sollicité l'aide de Radio Tanger qui a été très coopérative et la journée du 8
mars a été célébrée à la maison des femmes par une journée portes ouvertes ».
Quant à Malika Horchani, coordinatrice de l'Espace Tanassof (la maison
des femmes pour la Tunisie), elle a précisé qu'il s'est agi « de trouver les modalités
d'action les plus appropriées au contexte tunisien ». La mise sur pied de cet espace
(auquel on a donné le nom d'égalité-équité) constitua une première étape dans la
réalisation du projet, la seconde étant « un plan d'activités qui vont du conseil ou
orientation juridique, psychologique ou sanitaire au séminaire de sensibilisation pour les
questions qui touchent aux droits des femmes ou aux ateliers de formation en vue de
l'acquisition, par les femmes, de compétences ». Bien que tout le programme soit prêt
ainsi que le cadre de travail et les compétences, Malika Horchani a toutefois signalé
« des difficultés d'ordre administratif, bureaucratique ou politique qui s'opposent à la
mise en oeuvre des actions programmées ».
Les difficultés rencontrées par les femmes algériennes et tunisiennes pour concrétiser
le projet d'une maison des femmes ont encore une fois été relevées, au cours du débat,
par la représentante algérienne qui a toutefois signalé que « bien que dans les deux
pays - Algérie et Tunisie - l'autorisation légale n'ait pas encore été donnée, cela ne nous a
pas empêché de concrétiser notre projet. Dans nos pays, se pose réellement un problème de
démocratie » a-t-elle poursuivi en insistant sur le fait que la démocratie concerne les
hommes et les femmes et que « celles-ci sont mobilisées, elles ne feront pas marche
arrière, nous atteindrons l'égalité ».
Cette note d'espoir a été un des traits dominants de ce débat dont les interventions se
sont axées sur les expériences vécues dans les trois pays du Maghreb et la nécessité
d'une approche participative. À noter une présence consistante de représentants
masculins d'associations à caractère essentiellement syndical mais, en dehors des
allocutions officielles, une faible participation au débat. L'inauguration de la maison
des femmes tunisienne Tanassof, en fin d'après midi, a sans doute participé de
cette note d'espoir : agréable villa située au centre de l'Ariana, elle est prête à
accueillir les femmes en quête d'orientation juridique ou autre mais il restera aux
animatrices de cet espace à en faire le cadre adéquat pour de nouveaux combats, sous
les formes les plus adaptées, pour l'égalité et la démocratie.