Alternatives citoyennes
Numéro 8 - 20 mars 2002
Polémiques
Réaction de Marguerite Rollinde et mise au point de la rédaction

 

Un préambule signé de la rédaction d'Alternatives citoyennes, ouvrant le dossier d'actualité consacré à l'affaire Hamma Hammami (Alternatives Citoyennes numéro 7), a suscité une réaction de Marguerite Rollinde, secrétaire générale de l'association Hourrya-Liberté et auteur d'un article dans ce dossier, qui l'a diffusée sur la liste « maghreb-ddh » le 24 février, en même temps qu'elle l'a adressée à la revue. La rédaction d'« Alternatives Citoyennes » ne souhaite pas participer à des polémiques, notamment dans la situation actuelle, mais nous ne pouvions rester sans réponse à cette réaction. La mise au point de la rédaction, publiée le 28 février sur la même liste de discussion, est donc reproduite ci-dessous. Nous espérons toutefois que ces échanges stériles pourront en rester là.

La rédaction

Réaction de Marguerite Rollinde

Je tiens à vous exprimer mon total désaccord avec l'éditorial du numéro 7 de votre revue Alternatives citoyennes. En vous faisant l'écho des ragots de caniveau qui circulent sur une prétendue "protection" de Hamma Hammami par l'homme d'affaires Kamel Ltaief, vous mettez votre revue au même niveau qu'une certaine presse tunisienne que vous dites combattre. Je ne peux accepter d'associer à ce genre de sous entendus l'article que je vous ai adressé, à votre demande, et donc mon nom et celui de l'association Hourriya. Sans compter que les qualificatifs que vous employez pour H.Hammami (éternel jeune premier) et pour Radhia Nasraoui (madone rouge des prisonnires insoumis) sont tout à fait déplacés dans les circonstances dramatiques que non seulement eux mais toute la société tunisienne vit actuellement. Je vous demande le droit de réponse qui doit se traduire par la publication de l'intégralité de ce texte dans votre prochain numéro 8. Vous voudrez bien me confirmer par retour que ce texte sera publié. Marguerite Rollinde

Mise au point de la rédaction d'Alternatives Citoyennes

Ce dossier d'actualité comportait quatre textes ne présentant aucune ambiguïté quant à la dénonciation du simulacre de procès dont ont été victimes ces militants du PCOT et quant à la solidarité assumée par Alternatives citoyennes envers ces victimes de la répression. Cependant, le préambule du dossier d'actualité ouvrait sur quelques interrogations soulevées ici et là, autour d'un soutien dont aurait bénéficié Hamma Hammami pendant sa clandestinité. Le lecteur pourra juger de ce préambule comme des autres textes du dossier en consultant le numéro 7 de la revue.

1. Nous trouvons particulièrement déplacé, contraire aux usages et à la déontologie journalistique que Marguerite Rollinde se soit empressée de publier sur la liste maghreb-ddh une réaction qu'elle nous faisait parvenir dans le même temps en nous demandant de la publier dans le prochain numéro d'Alternatives Citoyennes, sous forme de droit de réponse.

2. Nous signalons à Marguerite Rollinde que la publication de sa réaction ne saurait être exigée au titre du droit de réponse, car elle n'est pas personnellement concernée par le préambule de la rédaction. Cependant, nous acceptons de publier sa réaction accompagnée de notre mise en point.

3. Les qualificatifs que nous avions donnés à Hamma et à Radhia étaient dans notre esprit affectueux et en aucun cas disqualifiants. Du reste, le qualificatif « madone rouge » (comme on dit « passionnaria »), attribué à Radhia, avait déjà été utilisé en présentation d'un plaidoyer de Radhia en faveur des prisonniers d'opinion publié dans Alternatives Citoyennes numéro 2, et elle-même ne s'en était aucunement offusquée. Quant à Hamma, qui sait mieux que quiconque notre affection personnelle pour lui, il se souvient sans doute d'oeillets rouges que nous lui avions apportés au nez et à la barbe de trois policiers armés, dans une chambre de l'hôpital Charles Nicolle de Tunis, au service de néphrologie où il était détenu. Ceci pour la petite histoire, et notre solidarité avec lui, sa famille et ses compagnons ne se démentira pas non plus à l'avenir pour ce qui concerne leur droit à une organisation politique et à l'expression pacifique et démocratique de leurs convictions, ainsi que bien sūr et avant toute chose, pour leur libération sans conditions.

4. Cependant, nous ne sommes pas une organisation politique, ni une ONG de défense des droits de l'homme. Nous fonctionnons en journalistes indépendants et ne permettons à personne de jeter le discrédit sur notre engagement à promouvoir une information crédible, transparente, en dehors de toute allégeance. Notre observation de la scène politique tunisienne depuis une vingtaine d'années nous a appris à nous méfier des manichéismes portant à diabolisation d'un côté et angélisme de l'autre, à prendre nos distances par rapport à l'ensemble des contrefaçons, des supercheries et des impostures. Dans cet esprit d'examen critique, nous soulevons des interrogations, rendons publiques des controverses, appelons à des débats, car nous croyons que nos lecteurs sont adultes et en mesure de se forger une opinion en dehors de toute manipulation des uns ou des autres.

5. Nous rappelons à Marguerite Rollinde que cette information, nous la conduisons depuis notre pays en toute souveraineté, en y prenant des risques, sans filet, sans subsides de quiconque, avec beaucoup moins de confort et beaucoup plus de proximité que la manière dont on peut voir les choses de Paris. C'est cette indépendance qui fait le respect dont nous jouissons et qui nous apporte, à Alternatives citoyennes, le concours bénévole d'intellectuels, de responsables politiques, d'acteurs et d'actrices de la société civile. Il n'y a qu'à lire la revue pour s'assurer de cette considération. En conséquence, si nous sommes reconnaissants de la solidarité de militants français ou d'ONG françaises telles Hourryia/Liberté, nous voudrions rappeler que cela ne leur accorde pas pour autant le droit de nous donner des leçons, surtout de loin et à partir des positions distanciées, parfois paternalistes et légères, que certains occupent.

C'est en toute souveraineté que nous entendons participer à la définition d'une évolution démocratique dans notre pays, en commençant par l'étape la plus importante : contribuer à ce que chacun - au-delà d'une élite dite « éclairée » - se réapproprie des capacités d'esprit critique. Les réactions que nous recevons de nos lecteurs, les chiffres de consultation de notre site, ainsi que les innombrables diffusions - souvent sous le manteau  - de copies imprimées des articles publiés nous montrent que nous sommes sur la bonne voie.

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