ous avons eu droit ces derniers temps à un foisonnement de textes, de déclarations d'anciens ténors de l'époque bourguibienne. Tous, anciens ministres, ambassadeurs et parfois idéologues de l'ancien régime se proposent au public et se présentent sous un angle historique, comme étant de fervents défenseurs de la démocratie, du pluralisme et des libertés.
Tous, sans exception, étaient impliqués dans la politique de Bourguiba et même du nouveau régime de 1987. Les uns se présentent comme de futurs dirigeants du mouvement démocratique. Les plus fascistes se découvrent une vocation de démocrates. Ces messieurs oublient que le peuple n'oublie pas.
Des centaines de milliers de victimes de la répression reconnaissent en eux leurs tortionnaires des années 73, 74, 75. Ce que ces messieurs nous ont fait est horrible. De son bureau de ministre de l'Intérieur, l'un d'eux commandait les séances de torture infligée aux dizaines de militants marxistes, incarcérés dans les locaux et caves du ministère. Parfois, c'était lui-même le tortionnaire en chef. Il procédait personnellement aux interrogatoires. De jeunes filles et femmes ont été victimes de ses exactions et de sa dérive. Des familles entières ont payé le tribut de ses inhumanités. Je n'ai pas honte de dire que ces messieurs « nouveaux démocrates » ont violé notre peuple, lui ont volé toute joie de vivre et ils sont responsables, beaucoup plus responsables que Bourguiba.
Personne n'a le droit d'oublier que, au nom de leur unité nationale, ils ont torturé, violé, condamné à ces dizaines d'années de prison les meilleurs garçons et filles de la Tunisie. Des yeux ont été crevés, des ongles arrachés, des sexes cravachés au nom de la Nation, du socialisme destourien, du collectivisme etc. Nous traînons jusqu'à ce jour les traces et les effets de la politique de ces messieurs qui viennent aujourd'hui s'adapter au label des droits de l'homme et de la démocratie et qui jettent toute la responsabilité sur le dos d'un mort oublié. Nous sommes là, et vos livres blancs 68-78 sont encore là. Tout le monde se rappelle encore vos discours sur la minorité trotskyste, la pêche en eau trouble, les gens vendus, les puces à écraser etc.
Eh bien, cette minorité, c'est nous tous. Ce sont ces centaines de militants et militantes de gauche qui façonnent aujourd'hui le projet de la Tunisie démocratique que vous voulez partager. Ayez honte au moins et taisez-vous pour que les gens vous oublient et ne sachent rien de votre répertoire exécrable.
Ce ne sont pas vos déclarations à la presse ou sur les chaînes de mercenaires qui vont réhabiliter et redorer votre blason. Notre peuple s'en sortira sans vous.