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Blocages et sit-in, pourquoi ?

En contribution au débat, nous publions cette réaction de l'un de nos lecteurs, qui se présente lui-même comme étant « parmi les premiers Tunisiens à suivre ce journal depuis tant d'années ». L'information relative aux circonstances du décès du jeune Adam Ghribi a fait l'objet d'un communiqué du ministère de l'Éducation.

La rédaction

J'ai lu votre dernier article, dont je me permets de reproduire un extrait avec lequel je ne suis pas d'accord, et j'ai même j'ai été choqué de lire cette partie :

« Dans le pays les sit-inners s'établissent, les grévistes se relaient, le Kef puis Monastir baissent leurs rideaux et les coupeurs de routes bloquent tout trafic commercial. Ces pauvres gens ne sont pas des brigands de grand chemin mais trop longtemps privés de tout, ils en redemandent et dans l'urgence. Contre l'oubli de leurs revendication, en ce 1er mai des jeunes gens entonnent ce chant : « sa nouwasilou al kifa7, besmi el 3amel wel fala7 » ».

Je vais parler en mon nom personnel, ingénieur principal dans une grande boîte pétrolière multinationale : je peux compter les jours travaillés, depuis le 14 janvier jusqu'à aujourd'hui, ils se comptent sur les doigts d'une main, à cause des « sit-in ». Voilà quelques exemples de ces dépassements que personne ne peut tolérer :

1- Des gens qui nous bloquent à la sortie de l'usine, on est pris en otages : au lieu de rentrer chez nous à 17h00, on est rentré plusieurs fois à 22h00, la situation était critique, les travailleurs, cadres, directeurs, dont des femmes, à bout de nerfs, stressés.

2- Un blocage de près de 20 à 25 voitures, au cours duquel les employés ont été privés d'entrer à l'usine ou de rebrousser chemin : cette prise d'otage a duré de 8h30 à 15h00, et après des négociations, les employés ont été relâchés. Combien d'heures sans eau, sans médicaments pour certains, sans prière du vendredi pour quelque uns ?

3- Un blocage des routes menant à l'usine, dont la route de Gabès, route principale qui relie tout le sud à la Libye.

4- Les routes bloquées avec demande d'argent pour faire passer des voitures, le sit-in à Sidi Saleh, à 20 km de Sfax, qui a causé la mort d'un jeune élève de 8ème année, à Ghraba : il est décédé, pourquoi ? Tout simplement, l'enfant a eu une crise cardiaque, une ambulance n'a pas pu arriver a temps pour secourir cet enfant - son nom est Adam - car la route était bloquée à Sidi Saleh. Est-ce normal ? Non, bien sûr.

Je défends ces miséreux, ces chômeurs, ces délaissés, etc. Mais est-ce avec ce type de comportement qu'on va arriver à bâtir une Tunisie nouvelle ? Est-ce en me privant de passer, de conduire pour voir un médecin, ou faire mes courses normalement, vivre ma vie, que je vais défendre ces gens, ou même leur offrir un emploi quand l'occasion se présentera ? Bien sûr que non.

Est-ce en bloquant la route, est-ce avec le décès de Adam Ghribi, que ces gens ont atteint leurs objectifs ? Je ne peux évidement pas le comprendre. Si je veux faire une grève, je ne peux pas priver d'autres gens de vivre leur vie, je ne peux pas les priver de leur liberté, il y a des moyens de faire une grève, ou d'établir un sit-in, sans toucher à autres gens, qu'il est de mon devoir de respecter comme il est de leur devoir de me respecter.

Donc la notion de liberté est mal assumée par les Tunisiens et les Tunisiennes. Trop de gens disent que c'est normal, moi je dis que ce n'est pas normal car derrière tout mouvement il y a des gens et des forces qui tirent les ficelles. Ces gens passent des nuits sous une tente louée en temps hivernal à 60 dinars la nuit, et qui est utilisée pendant 40 à 60 jours : qui paie le loyer ? Comment vivent ces gens ? Qui paie les cigarettes, le vin et les femmes des grévistes ? Etc.

Je reviens sur un point important pour conclure, question qui ne trouve pas de réponse, du moins à mon sens : où est la sécurité ? Comment peut-on tolérer des routes bloquées ? Des gens pris en otages ? Des usines bloquées ? Bloquer la route, quand cela mène à la mort de Adam Ghribi, est considéré comme un meurtre, non ? Le blocage des portes d'une compagnie n'est-il pas considéré comme une prise d'otages, qui peut coûter 10 ans de prison ou plus ?

Je souhaite que mes idées trouvent un espace dans votre magazine. Cet article et son contenu sont mes idées, je parle juste en mon nom, et non pas au nom de ma compagnie. Merci.

Faycal Bellali
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